Les Odyssées
Odyssée n°2 : Jusqu’où remonte ma mémoire ?
En partenariat avec le Festival d’Israël
et l’Institut Français de Tel-Aviv
Voix : Aharon Appelfeld
Création en mai 2016 – Théâtre de Jérusalem
“Pour le Festival de Jérusalem, j’avais un rêve qui a pu se réaliser : proposer à Aharon Appelfeld de transformer la 3ème aventure de mon Odyssée, le Récit, en un duo pour sa voix et mon violoncelle.
La bande-son diffuse un son lancinant, comme venu de loin, le murmure d’une ville endormie.
Mon violoncelle prend la parole, d’un son grave et rauque, il déroule une phrase lentement, jusqu’à une première coupure gutturale, qui laisse l’auditeur en suspens. Le murmure continue en attente.
C’est la voix d’Aharon Appelfeld qui poursuit. Lente, rauque elle aussi, douce, elle raconte.
C’est L’Histoire d’une vie, son roman dont il lit des extraits.
Plus le dialogue avance, plus on sent les accents du violoncelle se rapprocher de son hébreu, de son timbre, de son intonation. Jusqu’à ce que les deux se confondent. Imperceptiblement, comme dans un rêve, leurs musiques se rejoignent.”

— extrait de Histoire d’Une Vie
Copyright © 1999, Aharon Appelfeld, All rights reservedOù commence ma mémoire ? Parfois il me semble que ce n’est que vers quatre ans, lorsque nous partîmes pour la première fois, ma mère, mon père et moi, en villégiature dans les forêts sombres et humides des Carpates. D’autres fois il me semble qu’elle a germé en moi avant cela, dans ma chambre, près de la double fenêtre ornée de fleurs en papier. La neige tombe et des flocons doux, cotonneux, se déversent du ciel. Le bruissement est imperceptible. De longues heures, je reste assis à regarder ce prodige, jusqu’à ce que je me fonde dans la coulée blanche et m’endorme.
Aharon Appelfeld est né en 1932 en Bucovine. Quand la guerre éclate, sa famille est envoyée dans un ghetto puis déportée. À l’automne 1942, Aharon Appelfeld s’évade du camp de Transnistrie. Recueilli en 1945 par l’Armée rouge, il traverse l’Europe pendant des mois avec un groupe d’orphelins, arrive en Italie et s’embarque clandestinement pour la Palestine où il arrive en 1946. À la fin des années 1950, il décide de se tourner vers la littérature et se met à écrire, en hébreu, sa « langue maternelle adoptive ». Un demi-siècle plus tard, Aharon Appelfeld, devenu l’un des plus grands écrivain de notre temps, a publié une trentaine de livres.